Agriculture : halte au déni de crise libérale !
Les producteurs de fruits et légumes français sont dans le rouge. Le ministre de l’Agriculture vient de répondre par une énième mesure d’exonération de cotisations patronales sur les bas salaires. Mais ces soutiens au coup par coup ont bien du mal à soulager les victimes de ce qu’il faut bien appeler une véritable crise agricole européenne. Car la chute des cours touche un nombre croissant de productions : viande bovine, lait, beurre, céréales… Avec les 240 millions d’euros d’aides au retrait du marché ou au stockage dégagés pour la filière fruits et légumes en Europe, on ne répond pas aux problèmes de fond qui minent l’agriculture européenne.
Ainsi, les difficultés de revenus et de trésorerie qui s’accumulent pour plusieurs millions d’exploitations européennes ne peuvent être évacuées par de simples gestes ou soutiens d’urgence. Au risque de se répéter, il est indispensable de réaffirmer qu’au-delà des contrecoups de l’embargo russe sur certaines productions, les producteurs français récoltent aujourd’hui les fruits de la libéralisation forcenée des marchés, poussée depuis 20 ans par la Commission européenne.
Ce qui ruine l’avenir des paysans européens, c’est d’abord l’inconscience des décideurs à Bruxelles. Quel paradoxe en effet de voir le Conseil des ministres de l’Agriculture se préoccuper subitement de la gestion des volumes, quand les dirigeants européens et les commissaires successifs ont défendu des années durant la liquidation de tous les outils de régulation des volumes et des prix ! Et quel déni de volonté que de se préoccuper uniquement de compenser les pertes, sans jamais s’attaquer à la formation des prix et à la répartition de la valeur ajoutée au sein des filières agricoles !
La seule réponse à la crise que nous vivons ne peut objectivement résider dans la mise en place des mêmes palliatifs qui sont accordés à l’agriculture depuis 20 ans. Il faut refuser le déni de crise libérale pour dégager une vision d’avenir pour l’agriculture européenne. Seule une refondation de la politique agricole commune, centrée sur le retour d’une régulation publique des marchés, des volumes et des prix d’achat, est aujourd’hui à même de maintenir nos capacités de production, l’emploi agricole et rural et de concrétiser un nouveau modèle d’agriculture durable.
Au niveau national, c’est maintenant qu’il faut changer de cap et regagner des marges de manœuvre politiques face à la toute puissance des grands acteurs économiques et financiers. Les pouvoirs publics ne peuvent plus laisser les producteurs subir des prix d’achat souvent inférieurs aux coûts de production. Pour la distribution, la croissance des importations est une véritable stratégie de fond pour compresser toujours plus les prix d’achat aux producteurs. Dans ce cadre, il ne suffit pas d’en appeler à la simple « responsabilité » pour « ne pas spéculer sur une baisse des cours ». Ce que veulent nos producteurs qui voient les prix plonger, ce sont des mesures concrètes et efficaces pour ne pas mettre la clé sous la porte. La garantie des prix d’achat, notamment, doit être prise en urgence. Elle n’a sans doute jamais été d’une si urgente nécessité. C’est ce type d’annonces courageuses que les agriculteurs français attendent, ce jeudi 2 octobre, de la bouche du Ministre de l’Agriculture, au Sommet de l’élevage de Clermont-Ferrand.*
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Je serai à la rencontre des agriculteurs sur le sommet de l'élevage à Clermont-Ferrand, vendredi 3 octobre à partir de 15 h 30.