Coupe en règle pour le budget forestier
Le budget 2015 pour la forêt s’inscrit malheureusement dans la logique structurelle de baisse des moyens consacrés à cette filière depuis dix ans. Les rares budgets en augmentation étaient essentiellement dus à la prise en compte, après 2009, des conséquences de la tempête Klaus. Qu’en est-il des deux opérateurs concernés ? L’Office national des forêts (ONF) subit cette année une baisse drastique de ses crédits. Quant au Centre national de la propriété forestière (CNPF), sa subvention est réduite à zéro. Comme je l’ai dit en commission, elle est ainsi comparable à « un couteau sans manche qui aurait perdu sa lame. »
Avec une diminution de 14 %, les crédits consacrés à la forêt en 2015 ne tiennent absolument pas compte des besoins de la filière. Ainsi, ce budget va clairement dans le sens inverse d’une valorisation de notre potentiel forestier. Pourtant, la création en 2014 du Fonds stratégique de la forêt et du bois, outil demandé depuis longtemps, et les enjeux soulevés lors de l’examen de la loi d’avenir pour l’agriculture et la forêt, avaient marqué des signaux encourageants. Quelle peut donc bien être la logique de telles coupes franches, totalement contradictoires avec les objectifs recherchés ?
Aussi, comme rapporteur pour avis sur ce budget, j’ai tenu à rappeler combien de telles orientations seront préjudiciables à l’ensemble des acteurs publics et privés de la forêt. J’ai tout particulièrement pointé les dangers d’une remise en cause du régime forestier, qui est la garantie d’une gestion de la forêt publique française soucieuse de l’intérêt général et de l’égalité des territoires. Ce régime assure en effet une péréquation financière entre les régions où l’exploitation forestière est rentable et celles dotées de grandes forêts peu productives. Or, le financement de ce régime continue d’être remis en cause, l’État cherchant, dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, à se désengager en faisant supporter les coûts par d’autres acteurs. Face à la l’indignation et à la mobilisation des communes forestières, le Gouvernement a certes revu sa copie initiale, mais l’ONF devra prendre à sa charge une baisse de dotation de 20 millions d’euros. Faut-il se satisfaire de cette solution ? Certes non. Si je ne soutiens pas le refus de toute discussion sur les contours et l’avenir du régime forestier, il faut néanmoins être extrêmement prudent et analyser scrupuleusement les conséquences d’un changement de paradigme.
A la lumière des orientations budgétaires actuelles, de grandes questions doivent être posées : quel doit être le niveau du service universel assuré par l’ONF auprès des communes et pour le devenir de la forêt française ? Si l’Office a vocation à effectuer des travaux forestiers, ce que je crois, quel doit en être le périmètre de ses interventions, et quel doit être dès lors la nature des ventes ?
Ce qui est certain, c’est qu’il faut rechercher de nouvelles sources de financement pérennes pour l’ONF. L’enjeu crucial est d’identifier les actions pouvant faire l’objet de missions d’intérêt général confiées à l’Office, afin de permettre une plus juste rémunération des services rendus par la forêt en matière de préservation de la biodiversité, de contribution à la lutte contre le changement climatique et d’accueil du public. Car, pour cette filière d’avenir qu’est la forêt, il est temps aussi de proposer autre chose qu’une austérité aveugle et sans perspective.