Rassemblons-nous autour des valeurs républicaines
Deux jours après le terrible drame de Charlie Hebdo et ma réaction à chaud, l’exigence de dépasser l’émotion et la douleur me conduit à écrire ce nouveau texte.
Tout d’abord pour saluer la mémoire de Michel Renaud dont j’ignorais la mort quand j’ai rédigé mon premier communiqué. Fondateur de la Biennale du Carnet de voyage de Clermont-Ferrand, Michel Renaud était une personnalité auvergnate appréciée pour ses engagements culturels, son attachement à l’action collective et sa fidélité en amitié. Il est de ceux qui ont donné à la capitale auvergnate une dimension culturelle reconnue nationalement. Au-delà des 20 000 visiteurs du « Rendez-vous du carnet de voyage », ce sont des dizaines d’écrivains et dessinateurs voyageurs qui participent à la manifestation qu’il a initiée, désormais annuelle. J’ai bien évidemment une pensée pour sa famille et ses amis. Je m’associe à leur douleur comme à celle de tous les proches de l'ensemble des victimes de cet acte barbare, des anonymes aux plus connus.
Je voudrais ensuite souligner et saluer la grandeur de la réaction citoyenne dans tout le pays, et en particulier dans le département du Puy-de-Dôme et la circonscription que je représente à l’Assemblée nationale. Quand la France est attaquée dans ses valeurs et sa liberté, son peuple multicolore sait se lever et se dresser dans la plus grande dignité. Que notre pays est grand quand des millions de citoyens se retrouvent sur des valeurs partagées, quelles que soient leur situation sociale, leur couleur de peau, leur origine, leur religion ! Que la France est belle quand elle s’illumine des valeurs de solidarité, de défense des libertés, de respect des différences, de rejet des fanatismes ! Et je ne doute pas que les marches de ce week-end vont prendre une dimension qui la grandira encore davantage.
Pour autant, nous savons bien que l’émotion, aussi positive soit-elle, doit être accompagnée d’une vigilance sans failles. Plus que jamais, il nous faut être attentif aux propos tenus. Plus que jamais, il nous faut écouter, dialoguer, expliquer et « travailler » les consciences. Aussi, nous faut-il être exigeant pour refuser les amalgames, écarter les appels à la haine et au racisme, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent. Beaucoup de témoignages me font en effet craindre que le risque est réel que la tragédie de Charlie Hebdo alimente le rejet des citoyens de religion musulmane. Nous avons une responsabilité historique pour combattre tous ceux qui alimentent les divisions en instrumentalisant l’émotion et la colère. C’est pour cette raison qu’il serait indécent d’associer au rassemblement républicain les forces d’extrême droite à l’idéologie de haine, vecteurs de racisme et de xénophobie. Je suis intimement persuadé que les victimes n'auraient pas voulu que cet acte odieux puisse conduire à un quelconque amalgame nauséabond.
Nous savons aussi que la tragédie servira de prétexte à la demande de nouvelles mesures que certains voudraient prendre dans la précipitation. Certes, il faut être ferme, sans concession à l'égard de l'obscurantisme et du barbarisme qu'il entraîne. Pour autant, donnons-nous le temps d'évaluer l’efficacité de notre arsenal juridique, prenons le temps de la réflexion, ne nous engouffrons pas dans des évolutions législatives précipitées et inefficaces, qui pourraient porter atteinte aux libertés fondamentales. Nous avons toujours en mémoire la vingtaine de lois sécuritaires votées en urgence par les gouvernements de droite entre 2002 et 2012, sous le coup d’une émotion instrumentalisée, avec les résultats que l’on connaît aujourd’hui.
Laissons donc du temps à notre démocratie en amplifiant le débat avec les citoyens aujourd’hui mobilisés. S’il y a urgence, c’est bien à encourager le bouillonnement démocratique sur des valeurs fortes et par l’expression citoyenne.
Ce débat doit se développer dans toutes ses dimensions, de façon approfondie. Je pense en particulier à la nécessité d’évaluer les directions prises au niveau international, le choix des guerres successives, la faiblesse de la voie diplomatique et des réponses politiques, l’instrumentalisation du « choc des civilisations ».
Je terminerai ces propos en appelant à une participation massive aux marches de ce week-end. Je serai pour ma part présent samedi à 14 h à Ambert, puis dimanche à 13 h 30 à Thiers avant de rejoindre la grande manifestation départementale de Clermont-Ferrand à 15 h. Soyons nombreux à marcher ensemble avec l’objectif d’un cheminement partagé dans la durée. Et surtout, que cette mobilisation ne soit pas une simple parenthèse !