« Le chef de l’État veut confisquer le pouvoir législatif »

Publié le par André Chassaigne

Entretien réalisé par Aurélien Soucheyre, à retrouver sur L’Humanité.

Pour le député PCF André Chassaigne, président du groupe GDR, le projet de Macron n’est « pas compatible avec une démocratie réelle. »

 

Quel objectif politique vise Emmanuel Macron avec son projet de réforme du Parlement ?

André Chassaigne Les annonces faites par le président lors de la campagne sont particulièrement inquiétantes pour notre démocratie. La réforme du droit du travail par ordonnances dès les premiers jours de la session parlementaire témoigne de son ambition. Son projet vise à raccourcir le processus parlementaire et à éviter les navettes qu’il considère comme une perte de temps. Sous couvert de rapidité, il s’agit de permettre au gouvernement de s’emparer du pouvoir législatif. Les parlementaires doivent, selon lui, être réduits à une fonction de contrôle pour mieux les empêcher de légiférer. Cette mise au pas du pouvoir législatif au profit du pouvoir exécutif n’est pas compatible avec une démocratie réelle. Les membres du gouvernement sont désignés selon le bon vouloir du prince. Quel mandat leur a confié le peuple ? Quelle légitimité ont-ils pour élaborer la loi ?

 

Que vise la suppression d’un tiers des députés ?

André Chassaigne Je ne pense pas que la réduction du nombre de députés et de sénateurs garantirait, à elle seule, plus d’efficacité. Je le pense d’autant moins que la réforme globale de Macron vise à confisquer le pouvoir législatif aux parlementaires. L’efficacité à laquelle aspirent nos concitoyens se situe plutôt dans la garantie de voir leurs intérêts représentés. C’est pour cela qu’il convient d’instaurer la proportionnelle intégrale aux élections législatives – et à toutes les élections d’ailleurs. L’endogamie, cet entre-soi qui règne au sommet de l’État et au Parlement, n’est pas un gage d’efficacité et de transparence. Je considère qu’une meilleure représentation de nos concitoyens passe aussi par une véritable revalorisation du rôle du Parlement.

 

Que pensez-vous de la suppression des amendements rejetés en commission ?

André Chassaigne Cela n’a pas de sens. Le débat ne peut nuire à la qualité du travail parlementaire, bien au contraire. Le dépôt, en séance, d’un amendement rejeté en commission est d’autant plus opportun qu’il permet de répondre aux objections qui lui ont été présentées et ont abouti à son rejet. Il faut, en outre, rappeler que seuls les députés membres d’une commission peuvent voter sur les amendements présentés en commission. Cette mesure, si elle était décidée, reviendrait à interdire à l’ensemble des parlementaires de prendre part à l’élaboration de la loi ! Un député ne serait législateur que sur un domaine précis. Mais a-t-il été désigné par les électeurs pour ne traiter que d’un sujet ? Non, le député est le représentant de ses électeurs pour l’ensemble des affaires de la cité.

 

Quel est l’enjeu des législatives, pour les députés PCF, combatifs sous Hollande ?

André Chassaigne Face à un président de la République déterminé à appliquer un programme rétrograde sous l’apparence de la nouveauté, il est plus que jamais nécessaire de faire converger dans leur diversité les projets antilibéraux et de transformation de la société. Les députés communistes ont vocation à jouer un rôle moteur dans cette reconstruction attendue de la gauche, à créer des passerelles, à faciliter le dialogue et l’élaboration de stratégies communes, dans le respect de l’identité de chacun. Faire reculer les dogmes libéraux et le pouvoir de la finance sera au cœur du combat de la gauche et c’est pourquoi nous avons l’obligation, la lourde responsabilité de fédérer et d’unir nos forces.

« Le chef de l’État veut confisquer le pouvoir législatif »
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