Dans l’Aude, des luttes qui construisent l’avenir
Mon déplacement dans l’Aude, la semaine dernière, m’aura permis de confirmer que l’intelligence collective des salariés et la lutte commune des élus et des citoyens constituent une des clés du changement.
Ce sont d’abord les syndicalistes et salariés de l’usine Pilpa de Carcassonne, en lutte depuis juillet 2012, qui m’ont accueilli. Les dirigeants de l’entreprise de crème glacée s’acharnent à vouloir fermer un site qui est pourtant « compétitif » et rentable, pour répondre uniquement à la stratégie financière des actionnaires du fonds de pension anglo-allemand Oaktree. Scandalisés par le captage du savoir-faire audois pour délocaliser ensuite la production, j’ai pu mesurer avec les salariés combien est devenue incompatible l’ambition d’un redressement industriel en France avec les contraintes financières qu’imposent des actionnaires qui ne considèrent l’emploi que comme une variable d’ajustement. C’est une nouvelle fois la preuve bien réelle, que c’est à la question du coût du capital que nous devrions nous attaquer.
En lien direct, il nous faut aussi avancer rapidement pour ouvrir de nouveaux droits aux salariés pour réorienter les choix productifs et commerciaux des entreprises. Dans le cas de Pilpa, la mobilisation sans faille des 120 salariés permet aujourd’hui de mettre sur la table des solutions alternatives concrètes, avec un projet de SCOP, où l’engagement des pouvoirs publics et du Gouvernement sera déterminant. J’ai été véritablement enthousiasmé par la qualité de la réflexion des salariés, ces forces vives, éclairées, que le MEDEF veut confiner au seul rôle de main d’œuvre adaptable et flexible. Oui, les salariés sont capables de redresser une entreprise, de faire des choix de gestion et d’adaptation de leur outil de production bien plus efficaces en terme d’emploi et d’avenir que les détenteurs des capitaux. Pour peu qu’on leur en donne le droit !
Les « ouvriers bâtisseurs d’avenir » méritent plus qu’une simple considération. Leur action, comme celle des Fralib, devrait pourvoir servir d’exemple pratique pour de réelles avancées législatives. Je m’y suis engagé, en rapport direct avec les débats à venir sur le projet de loi dit « de sécurisation de l’emploi », et le dépôt des deux propositions de loi, la première portant sur l’interdiction des licenciements boursiers ou abusifs, et la seconde sur de nouveaux droits de préemption des salariés lors de la cession d’une entreprise. Notre tâche est maintenant de gagner des majorités d’idées autour de ces mesures indispensables au développement de l’emploi et au renouveau industriel de notre pays. Pilpa vivra, Pilpa vaincra !
Après une réunion publique à Carcassonne sur le thème de l’égalité femmes-hommes, où la qualité des échanges a permis de souligner l’ampleur du travail à mener pour réduire les inégalités, mon itinéraire audois s’est aussi arrêté dans le village de Camplong d’Aude. Son maire communiste, Serge Lépine, fêtait 30 années de mandat, avec toujours au cœur son combat pour la défense des services publics et le développement rural. Une fois encore, son appel pour refuser le délitement de la présence du service public postal, suivi par quelques 120 maires audois, a forcé La Poste, en ce début d’année 2013, à mettre en place une expérimentation avec le rétablissement des facteurs-receveurs. C’est le fruit, là-aussi d’un vrai travail collectif et de conviction.
Oui, dans l’Aude, les luttes construisent l’avenir… non sans faire penser à celles du Midi Rouge au début du XXème siècle.
Chronique publiée dans le journal La Terre.