De nouveaux pouvoirs pour les salariés, c’est maintenant !

Publié le par André Chassaigne

 Comment concrétiser l’ambition d’un redressement productif du pays, sans se donner les nouveaux outils indispensables pour stopper le démantèlement de notre tissu industriel, liés aux choix financiers des actionnaires et du secteur bancaire ? Voilà la question essentielle qu’il convient de poser après 3 mois d’exercice d’une majorité de gauche. D’autant plus que la cascade de plans de licenciements, de cessions d’entreprise et de délocalisations s’est accélérée au lendemain de l’élection du nouveau Président de la République.

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 Une fois passées les rodomontades gouvernementales, un constat s’impose : l’écart entre les outils règlementaires et les moyens juridiques à la disposition des groupes, et ceux réservés aux salariés et aux pouvoirs publics est gigantesque. Les actionnaires et dirigeants ont quasiment les mains libres pour défaire en quelques mois un site industriel sur notre territoire. Et les salariés n’ont quasiment pas leur mot à dire en cas de délocalisation ou de cession d’activité. Le constat est ainsi malheureusement bien amer pour l’Etat, qui, faute d’outils adaptés, mais aussi de réelle volonté politique, s’en tient de fait au constat d’échec avec des portes de sortie artificiellement embellies par quelques compensations.

 Le secteur de l’agroalimentaire illustre parfaitement le besoin d’outils législatifs nouveaux et adaptés à chaque situation. Que ce soit avec le groupe Doux placé en liquidation, et soumis à vente à la découpe par le tribunal de commerce ; avec les salariés de Fralib – Thé l’Elephant dans les Bouches-du-Rhône qui poursuivent leur bras de fer avec la multinationale Unilever ; ou avec l’entreprise Pilpa, fabricant de crème glacée à Carcassonne, dont le groupe R&R Ice Cream annonce brutalement la fermeture, chaque atteinte à l’outil industriel est singulière.

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 Pour les salariés de Fralib, qui ont travaillé des mois durant sur un projet de reprise salariale de l’entreprise, c’est l’absence d’une loi sur le droit de préemption, leur permettant notamment d’acquérir la marque de thés Eléphant, qui constitue le point de blocage. Qu’en serait-il de l’arrogance du PDG d’Unilever, dont le groupe vient d’annoncer 2,4 milliards d’euros de profits pour le premier semestre de 2012, si un tel dispositif était prévu en cas d’abandon industriel ? C’est cette proposition de loi instaurant un véritable droit de préemption des salariés en cas de cession de leur entreprise, et leur permettant de concrétiser leurs projets de reprise sous statut coopératif dans les meilleures conditions, que je ne cesse de réclamer avec les députés du Front de Gauche, fort du travail commun mené avec les acteurs de l’économie sociale.

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 L’enjeu du redressement industriel du pays se situe aussi bien en amont de la prise de décision.

 L’urgence sociale exige que de réels pouvoirs d’alerte et d’orientation au sein de l’entreprise soient dès maintenant confiés aux salariés. Avec, en complément une réorientation du crédit bancaire au service de l’investissement productif et innovant, de l’emploi et de la formation, que porterait un véritable pôle public bancaire et financier. Toutes ces mesures serviraient à démonter l’imposture des dividendes, qui se cache derrière le supposé « réalisme économique » ou les « surcapacités ».

 Mais il faut pour cela avoir l’ambition de les mettre tout de suite dans le débat public, et avoir le courage de prendre sans attendre les bonnes décisions.


 Chronique publiée dans le journal La Terre. 

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