Dérive climatique, réponses politiques
Le Groupe Intergouvernemental d’experts sur l’Evolution du Climat (GIEC), organisme intergouvernemental ouvert à tous les membres de l’ONU est chargé d’évaluer l’évolution du climat sur la base des dernières données scientifiques. Comme tous les six ans depuis 1990, il vient de rendre son dernier rapport qui confirme, avec encore plus de certitude, la responsabilité des émissions de CO2 issues des activités humaines comme facteur clé du réchauffement accéléré de la planète. Il pointe aussi de façon de plus en plus précise les risques de ces changements pour les populations et la vie terrestre : perte accélérée de notre biodiversité, baisse des capacités agricoles, impacts sur la santé, migrations massives en lien avec la hausse du niveau des mers et la désertification…
Derrière ce contenu alarmiste, qui peut parfois paraître éloigné des difficultés du quotidien, se cache un immense enjeu de société. Il s’agit en effet de savoir si l’ensemble des pays du monde, et d’abord ceux qui émettent le plus de gaz à effet de serre (GES), ou ayant le plus contribué par le passé aux émissions de GES, sont prêts à accorder leurs politiques pour prendre en compte ce bien commun à gérer qu’est le climat, en réduisant très fortement et dans la durée leurs émissions. C’est la condition sine qua non d’une maîtrise des effets du changement climatique pour les peuples et les générations futures. Et c’est à chaque fois sur ces objectifs chiffrés et contraignants de réduction que bloquent les négociations internationales.
En 2011, après l’échec des conférences de Copenhague et de Cancun, et à la veille de la réunion de Durban en Afrique du Sud, les députés du Front de Gauche avaient déposé à mon initiative une proposition de résolution devant l’Assemblée nationale sur les engagements à tenir en matière de réduction des émissions de GES. Dans ce texte, nous plaidions pour la mise en œuvre rapide de politiques de coopération à l’échelle mondiale, notamment en matière énergétique. Or, avec la crise du capitalisme mondialisé, nous assistons à des dynamiques inverses, de repli sur soi et de pression toujours plus fortes pour poursuivre sur le modèle d’une économie soumise aux logiques financières et au diktat des grands groupes.
Oui, il faut le répéter, nous ne sortirons pas de la dérive climatique sans changer en profondeur notre modèle économique, social et politique. C’est dans ce contexte que la France doit accueillir à Paris en 2015 la prochaine négociation internationale sur le climat, censée aboutir à des objectifs contraignants. Plutôt que de se contenter de répéter que « la maison brûle » sur la base des synthèses du GIEC, notre pays et l’Union Européenne, pour être à la hauteur des urgences climatiques, devraient d’abord poser publiquement le constat de l’impasse dans laquelle nous conduit le capitalisme mondialisé. Cet acte de courage politique devrait aussi s’accompagner de propositions concrètes de coopération, d’abord en matière énergétique, et en rupture avec la frénésie financière. Au-delà des querelles de chiffres, rarement suivis d’effets, il faut que la conférence de Paris sur le climat matérialise un nouveau chemin dans la politique climatique, sur lequel toute une série de gouvernements progressistes commencent à construire des alternatives au libre-échange si néfaste au climat. Dérive climatique, réponses politiques.
Chronique publiée dans le journal La Terre.