Entendrons-nous ce soir la musique du Titanic ?
Durban, vendredi 9 décembre 2011.
La conférence est depuis hier dans sa phase finale. Après des mois de travaux préparatoires dans de multiples groupes de travail, après deux semaines de discussions techniques intenses à Durban, après les ultimes ajustements sur des conclusions qui restent truffées d'alternatives, les ministres sont aux manettes.
Il faudra 2 nuits pour boucler un texte plus ou moins précis, plus ou moins contraignant,qui sera quoi qu'il en soit le plus petit dénominateur commun. Et chacun suppute: certains vendent irrémédiablement la peau de la planète perdue ; d'autres au contraire se préparent à sortir un voile pudique pour couvrir le vide sidéral des décisions finales.
Notre délégation a fait le point jeudi en fin de journée avec la ministre, avant qu'elle ne se lance dans la dernière ligne droite.
Tout d'abord un constat étonnant : rien n'est bouclé,plusieurs hypothèses restent envisageables, de la simple déclaration vide de contenu réel à l'accord global actant des objectifs précis, juridiquement contraignants, avec un calendrier d'avancement des engagements de chaque pays. Bien évidemment, le final sera, au mieux,... entre les deux.
En positif, sous réserve de remise en cause toujours possible, une avancée sur l'agriculture : elle ferait son entrée dans le débat climatique. Pas de décision particulière mais sa prise en compte dans les travaux futurs, au regard notamment de l'importance des agrocarburants, qui impliquent une évaluation globale au regard des conséquences de leur production sur l'environnement mais aussi sur les systèmes agricoles.
Je retrouve là un sujet que j'ai très souvent traité, regrettant l'hypocrisie sur cette question. En perspective aussi, une avancée sur le Fonds Vert, au profit des pays les plus pauvres afin qu'ils puissent conduire des actions de développement respectueuses des enjeux climatiques. Mais avec quel financement ?
Les négociations finales devraient acter la taxation généralisée de l'énergie carbonée des bateaux et avions.
Quant à la gestion du fonds, elle devrait associer des représentants de la société civile grâce au "front" regroupant ONG et syndicats. Une question est en attente, celle de son utilisation par le seul biais des États ou l'ouverture aux projets privés, comme le demandent expressément les multinationales de l'environnement sous le haut patronage de la Banque Mondiale. Les techniciens de la finance climatique sont aux aguets : les capitaux nouveaux sont toujours bons à prendre ! Au sujet des engagements du protocole de Kyoto et d'un nouvel accord global contraignant, c'est l'attente. Avec, semble-t-il, les États-Unis bousculés par les "bougés" de la Chine... Avec aussi une formule qui résume bien la situation : avoir le plus de monde possible sur le bateau des engagements fermes. Entendrons-nous ce soir la musique du Titanic ?