Intervention en ouverture du Festival "La Belle Rouge"

Publié le par André Chassaigne

Intervention prononcée à St-Amant-Roche-Savine, vendredi 24 juillet 2011, à l’ouverture du Festival « La Belle Rouge ».

 

 

    Je me pose chaque année les mêmes questions : que représente ce festival aux yeux de vous tous qui êtes ici ?

    - Tourisme et bol d’air frais pour Parisiens des XVIe, XVIIe et autres quartiers populaires, «annuellement bucoliques » comme disait Jean-Pierre Chabrol ?

    - Passe-temps d’un banal week-end estival ?

    - Apport économique pour notre village.

    - Des beaux costumes, de belles paroles, de belles chansons, de beaux films… ?

    Ne serait-ce pas plutôt un « merdre » à la bien-pensance, au moralement et intellectuellement correct, au formatage, au produit de marketing ?

    Ou plus simplement encore, tout naturellement le plaisir de la convivialité, de la fraternité d’une manifestation marquée politiquement, idéologiquement au bon sens du mot ?

 

    Du « merdre » du Père Ubu au plaisir d’échanger, je crois que c’est surtout que nous trouvons tous là un sens, une direction qui manque si cruellement dans cette vie et dans l’art d’aujourd’hui.

    Et au-delà de l’art, du spectacle vivant jusqu’au cinéma, je crois que nous sommes surtout là, dans ce rendez-vous annuel avec Jolie Môme, pour recharger, oui « recharger », le sens de nos combats, de notre vie donc.

    Dans un des plus beaux textes du répertoire de Jolie Môme, que j’ai si souvent cité dans d’autres lieux et d’autres contextes, vous nous chantez le sous-commandant Marcos qui « écrit qu’il aime la vie, la justice et la poésie » alors que « souffle le vent d’en bas ».

    C’est bien ce « vent d’en bas » qui souffle ce week-end. Et il apporte avec lui le bonheur de la lutte.

    Cette lutte que nous portons pour « copartager » un monde commun. Et nous ne le faisons pas dans l’illusion du consensus !

    Car consensus y a-t-il entre nous ?

    - De la fission nucléaire et politique… à la fusion nucléaire et politique.

    - De la grève générale non renouvelable… au rêve général et renouvelable.

    - Des grands défilés des boulevards… à la révolution permanente.

    - Du rouge… au rouge et vert… voire au ver dans le fruit.

    - Du marteau à la faucille… mais pas jusqu’au piolet…


 

    Nous sommes plutôt en création vivante de ce beau slogan des Tupamaros « Les mots nous divisent, les actes nous unissent ».

    C’est vraiment ce qui est important alors que d’autres font « souffler le vent d’en haut, celui qui fait courber le dos ».

    Parce que le changement, le possible d’un autre monde, ne peut venir que de nous : les citoyens, les militants, les organisations, les associations, les syndicats, les partis. Et même les Jolie Môme ! Les Jolie Môme que nous sommes tous aujourd’hui, ici même dans ce petit village.

    Et dans l’attente que ça pète, buvons notre bonheur avec la douceur de l’air et la vigueur des airs de nos montagnes rebelles.


 

    Je terminerai presque avec la citation d’un écrivain qui n’était ni stal, ni trotzkard, ni anar, ni écolo, même pas soce-dem… plutôt réac au contraire… mais qui a écrit des pages sublimes au cœur de notre pays du Livradois : « Le bonheur date de la plus haute Antiquité disait-il. Il est quand même tout neuf car il a peu servi ».

    Chacun a reconnu bien sûr Alexandre Vialatte, qui concluait ses chroniques du journal La Montagne, comme je ne conclurai surtout pas mon discours, par un tonitruant : « Et c’est ainsi qu’Allah est grand ! ».

    Parce que je préfère conclure avec Aimé Césaire : « C’est quoi une vie d’homme ? C’est le combat de l’ombre et de la lumière. C’est une lutte entre l’espoir et le désespoir, entre la lucidité et la ferveur. Je suis du côté de l’espérance, mais d’une espérance conquise, lucide, hors de toute naïveté ».


    Vive la Belle Rouge !

 

 

 

 

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La compagnie Jolie Môme


 

Petit historique du festival en vidéo

 

 

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M
<br /> Merci Monsieur Chassaigne pour ce bel article et pour le juste hommage que vous rendez au très grand Vialatte.<br /> <br /> Ce Festival, que je n'ai fréquenté que deux fois (à mon grand regret) est une perle rare, un îlot de fantaisie, d'amitié, d'intelligence et d'engagement.<br /> Merci à vous d'en être un acteur décisif et de continuer à le choyer !<br /> Tous ensemble avec le Front de gauche et avec vous à la belle Roche-Savine !<br /> <br /> <br />
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