La « leçon de choses » d’un député « ordinaire »
Chaque fin de semaine est pour le député que je suis un moment privilégié de l’exercice de mon mandat. Au-delà du bonheur de respirer à nouveau l’air du pays, le face à face avec la population est riche d’enseignements. Ce dernier week-end d’octobre, je n’aurai pas échappé à ce que j’appelle « la leçon de choses du député ordinaire ».
Ainsi, ma participation à l’Assemblée générale de la dynamique Association Départementale des Retraités Agricole (ADRA). Les anciens paysans, femmes et hommes, sont plus de 200, porteurs de leur quotidien de retraités quasiment tous en dessous du seuil de pauvreté. Ils attendaient beaucoup de la nouvelle majorité, encouragés qu’ils étaient depuis 10 ans, à chaque Assemblée générale, par les envolés lyriques des députés socialistes du département promettant des mesures d’envergure pour remédier à la déplorable situation des travailleuses et travailleurs de la terre.
Au final, l’engagement de porter progressivement à 75 % du SMIC le montant des pensions des carrières complètes des chefs d’exploitation… Une mesure au minima se limitant à mettre simplement en application en 5 ans une décision du gouvernement de gauche en 2002 ! La déception est tellement prégnante, avec une colère retenue, que je me garde bien d’en rajouter, me limitant à souligner ce qui me paraît essentiel : alors que notre pays compte seulement un exploitant agricole actif pour 3,1 retraités, la seule solution est bien évidemment de mobiliser d’autres recettes avec notamment une taxe sur le chiffre d’affaires de l’industrie agroalimentaire, de la grande distribution alimentaire, des banques agricoles, de l’industrie du matériel agricole et des intrants. Le député socialiste présent répond « compétitivité de notre économie » et essaie de s’en sortir en rappelant… les échecs des régimes communistes du siècle dernier ! Le même m’a traité en effet de « stalinien » quand je me suis opposé, à la tribune de l’Assemblée nationale, à la réforme des retraites portée par le gouvernement. Je mesure alors les dégâts dans les regards des participants…
J’assiste aussi à l’Assemblée générale de l’Association des Maires du Puy-de-Dôme. Dans les salons de l’Hôtel-de-Ville de Clermont-Ferrand, je sens que les élus ruraux rongent leurs freins. Les questions « qui fâchent » émergent cependant, marquant là-aussi déception et colère. D’abord le découpage des nouveaux cantons, résultat d’une double volonté : réduction de la représentativité des populations rurales ; charcutage électoral au profit du Parti Socialiste. Mais aussi les diverses mesures qui portent atteinte à nos communes rurales : suppression du PLU communal au profit de l’intercommunalité, suppression de l’assistance technique apportée par l’Etat aux petites communes pour leurs investissements (ATESAT). Le Préfet s’efforce d’apporter des réponses apaisantes, les parlementaires socialistes d’en atténuer la portée… mais la réalité est là… et je mesure une fois encore les dégâts d’une politique dévastatrice pour nos territoires.
Fort heureusement, deux autres manifestations m’ont apporté un réel plaisir : la pose de la première pierre d’une école rurale et l’inauguration de nouveaux locaux d’une mairie. Parents d’élèves et population locale étaient dans les deux cas présents en nombre autour de leurs élus. Deux vrais moments de bonheur avec cette belle richesse qu’est le « vivre ensemble » au cœur de ces foyers de démocratie que sont les communes… ces communes que l’on veut effacer de la carte institutionnelle au profit de la compétitivité des métropoles.
Chronique publiée dans le journal La Terre.