La réforme des retraites ne se fera pas en catimini
C’est une certitude, la volonté du gouvernement, sur cette réforme des retraites, était d’aller vite, et de limiter le temps du débat. Réforme de 1993, de 2003, de 2010, et maintenant de 2013 : d’une majorité à l’autre, aucun Gouvernement n’a le courage de poser les questions de fond du financement des retraites. A chaque fois, nous assistons ainsi au même rituel de la tentative du passage en force, sur la base de prospectives financières alarmistes et d’arguments aussi massue que celui de la durée de vie qui augmente.
Pourtant la longue liste des réformes successives des régimes des retraites qui ne règlent rien, mais qui appuient toujours plus sur la tête des salariés, des jeunes et des retraités, aurait dû servir de leçon à ceux qui, il y a 3 ans, étaient vent debout contre la réforme Woerth allongeant la durée de cotisation et l’âge légal de départ.
Mais il est vrai que le contenu de cette nouvelle réforme est si gravissime qu’il deviendrait dangereux de permettre aux Françaises et aux Français d’en analyser toutes les conséquences pour leur avenir et celui de leurs enfants. Oui, plus le contenu de cette loi sera connu, plus chacun s’apercevra, pour l’essentiel, de sa gravité de ce projet. C’est pourquoi pour son premier examen devant l’Assemblée nationale, dès le 7 octobre prochain, le gouvernement a voulu mettre en place la procédure du temps contraint, dit « programmé », qui limite le temps de parole et donc l’intervention des députés pour défendre leurs amendements. Je rappelle que c’est l’ancienne majorité qui a mis en place ce système contre lequel, à l’époque, le président du groupe PS, Jean-Marc Ayrault, était viscéralement opposé, considérant qu’il remettait en cause la démocratie parlementaire. Triste constat lorsque 3 ans plus tard, on use de la même procédure pour tenter de museler la représentation nationale !
Ce débat ne doit pas se dérouler en catimini et doit laisser le temps aux Français, au mouvement social, d’en comprendre les enjeux et d’en être parties prenantes. C’est pourquoi j’ai exigé, comme Président de groupe, l’abandon du temps contraint en application d’un article du règlement de l’Assemblée. Ainsi, nous pourrons décortiquer cette loi, article par article, montrer ses dangers pour notre système de retraite et faire la preuve, à partir de témoignages, que derrière la technique de la loi, il y a des hommes et des femmes avec leurs souffrances, leurs espoirs qu’il faut entendre. C’est la parole des Françaises et des Français qu’il faut faire remonter lors de ce débat, alors que ce sont toujours les mêmes recettes libérales qui sont reproduites à chaque réforme. La parole de ces jeunes, sans emploi stable à 28, voire 30 ans, et qui devraient travailler jusqu’à 70 ans pour une retraite complète. La parole de ces quinquagénaires, qui ne retrouvent plus d’emploi, et qui partiront avec des décotes si importantes, qu’ils ne feront que survivre en retraite. La parole de ces femmes, aux carrières incomplètes, à temps partiel, et qui seront une nouvelle fois les premières victimes d’un allongement de la durée de cotisation. Face au martelage des arguments techniques et financiers du MEDEF, tapis sous le joli nom de « compétitivité », c’est au vécu, à la sagesse et à la raison du peuple de France que les députés du Front de Gauche feront appel dans ce débat. Nous lançons d’ailleurs un appel à toutes et tous pour nous faire remonter leur propre témoignage sur les conséquences de cette nouvelle réforme régressive pour le monde du travail.