Retraites agricoles ; le droit de survivre ?

Publié le par André Chassaigne

 

  Oui, ont-ils seulement le droit de survivre ? C’est à cette question qu’il nous faut répondre. Car les anciens agriculteurs et leurs familles, et tout particulièrement les femmes d’anciens exploitants figurent parmi les plus faibles niveaux de vie nationaux. Tout le monde le sait, tout le monde s’en émeut l’espace de la période électorale… pour s’en désintéresser lamentablement quelques mois plus tard. Le diagnostic, partagé, est on ne peut plus clair : le niveau moyen des retraites paysannes est aujourd’hui de 400 € par mois, très en dessous des 959 € du seuil de pauvreté.

 

 Les Germaine, les Marie, les Pierre… je les rencontre chaque semaine sur le territoire du Livradois - Forez. Derrière leurs visages, leur gentillesse, leur attention pour les mots de réconfort, je sais qu’il y a une souffrance, celle de continuer à vivre, avec les difficultés de l’âge dans une pauvreté de plus en plus pesante et l’angoisse de la dépendance aux enfants, amplifiée par la perspective de financer la maison de retraite.

 

 Cette injustice, rendue invisible par une société où l’humain est rejeté, ou cachée par dignité par ceux qui ont servi toute leur vie à nourrir le pays, me révolte. Et je me pose toujours cette question : est-ce parce que ces hommes et ces femmes ont le courage d’affronter avec dignité la vieillesse dans l’isolement, avec des services publics toujours plus éloignés d’eux, qu’il est si facile de prolonger leur attente et leur détresse ?

 

 Je sais aussi que beaucoup d’entre eux luttent déjà contre cette injustice qui a trop duré, comme les militants ou sympathisants de l’ANRAF , dont le combat pour des pensions de retraite dignes pour tous a été exemplaire ces dernières années.

 Le Président de la République a eu beau jeu de verser des larmes de crocodile en 2007 sur le caractère « indigne » du niveau de leurs pensions. En cinq ans, son Gouvernement et sa majorité leur aura en tout et pour tout octroyé 30 euros de revalorisation moyenne. Et voilà qu’il s’apprête, avec la hausse de la TVA à 21,2 %, à leur reprendre plus qu’il ne leur a donné. Ce dernier coup de force, imposé aux plus pauvres, est symbolique du mépris affiché pour l’humain.

 

 Face à tant d’injustices, pour nos aînés, pour ces milliers de femmes souvent seules, au courage du quotidien, il faut des réponses claires. Oui, nous devons leur assurer dès demain une vie meilleure avec une retraite qui ne soit pas inférieure à 85 % du SMIC. Cette mesure, c’est une simple exigence d’humanité. Ce doit être une exigence incontournable d’une société qui place l’humain d’abord.

 Cela suppose d’aborder le fond du financement de ce régime pour garantir sa pérennité en visant l’instauration d’une cotisation nouvelle sur les revenus financiers et institutions financières du secteur agricole et agroalimentaire.

 C’est une mesure de justice quand certaines transnationales de la distribution ou certains géants du secteur bancaire et assurantiel réalisent des milliards d’euros de bénéfices nets annuels, grâce aux efforts passés des retraités, ou sur le dos des agriculteurs actuels.

 

 

Chronique publiée dans le journal La Terre du 7 au 14 février 2012.

 


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