Sidérurgie : un plan et des outils… pas du sang et des larmes !
En interrogeant à deux reprises en quelques jours le ministre du Redressement productif sur l’indispensable nationalisation du site ArcellorMittal de Florange, mon objectif n’était pas de faire de la surenchère. Mon interpellation répétée s’appuyait sur un constat douloureux pour le pays, celui de l’hémorragie industrielle débutée au début des années 1980 par la prise de pouvoir de la finance. En rappelant d’abord que la perte de plus de 2 millions d’emplois dans le secteur en 30 ans est la conséquence d’un abandon : l’abandon d’une politique de développement industriel jugée obsolète par les chantres de la pensée néolibérale. Comme le rappelait Pierre Laurent dans son discours de Lille sur l’industrie, « la France, avec 12 % de part industrielle (dans son PIB), est désormais à la 15ème place des pays membres de la zone Euro, loin derrière l’Italie, la Suède et l’Allemagne. »
20 années de politique du dividende ont produit leurs effets. En 2011, ce sont encore 309 milliards d’euros d’intérêts, de frais bancaires, de dividendes versés, contre seulement 145 milliards d'euros de cotisations sociales patronales. La finance - le coût du capital - est bien l’ennemi. Avec la crise financière depuis 2007 et la droite au pouvoir, tous les ingrédients ont été réunis pour accélérer le mouvement sans que les peuples n’aient leur mot à dire.
Mais pour l’avenir de notre pays, c’est maintenant qu’il faut marquer un coup d’arrêt. La nationalisation de Florange pouvait constituer un premier signal. La Présidente de MEDEF, plus idéologue que jamais, ne s’y était d’ailleurs pas trompée en voyant dans le mot « nationalisation » un propos « scandaleux ». Sans doute jugeait-t-elle normale qu’un milliardaire indien, résidant en Grande-Bretagne, joue chaque jour avec l’avenir de milliers de salariés de la sidérurgie ? Sans doute préférait-elle que chaque mois, des milliers d’ouvriers supplémentaires s’inscrivent à Pôle emploi ?
Pour contrecarrer cette saignée de l’emploi, il est urgent de changer radicalement de politique industrielle en mettant la finance au service de l’économie et non l’inverse. Ce n’est pas « du sang et des larmes » qu’il faut pour la sidérurgie mais un véritable plan et des outils efficaces.
Commençons par le plan : il faut une nouvelle ambition industrielle, fondée sur transformation écologique et sociale de notre industrie. Une industrie utile, qui produit des biens et des services durables, intégrant pleinement leur cycle de vie à la conception. Une industrie qui produit plus pour ses habitants, et qui prend à bras le corps l’exigence de la transition énergétique.
Pour suivre ce plan, la puissance publique doit bénéficier d’outils diversifiés. Il est temps que l’État prenne des participations pour redynamiser des secteurs clés de l’économie, dans l’intérêt général, en lien avec l’ensemble des filières qui bénéficient de ces productions. La sidérurgie en est l’exemple même, compte tenu de l’importance de la consommation d’acier dans les services et entreprises publics ou mixtes (SNCF, RATP, EDF, GDF-Suez, Renault, chantiers navals, grands propriétaires de logements sociaux), et toutes les PME clientes ou sous-traitantes.
Au lieu de jouer la politique de la montre avec la finance, il faut appuyer un véritable projet industriel durable pour la sidérurgie lorraine, française et européenne. Les décisions prises en fin de semaine dernière par le Gouvernement sur le devenir du site de Florange ne vont pas dans ce sens, et concrétisent le refus de résister au MEDEF et aux forces de l’argent. De plus, elles participent au rejet de la parole publique par la population, accentuant ainsi la crise démocratique.
Questions au Gouvernement sur Florange :