Urbanisme : la casse continue au détriment des communes
La semaine dernière, l’Assemblée nationale a examiné le quatrième texte traitant de la question du logement et de l’urbanisme depuis un an. Même si ces textes comportent certaines avancées, ils ont été invariablement soumis au filtre de l’austérité budgétaire, se cantonnant ainsi trop souvent à des mesures d’appoint. Il s’agit pourtant d’un sujet fondamental, alors 40 % des ménages français dépensent plus de 40 % de leurs revenus pour se loger.
Intervention générale sur le projet de loi ALUR - 10/09/2013
Mais le projet de loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) entérine des choix particulièrement inquiétants pour l’avenir de nos communes. Son volet urbanistique rend ainsi l’instauration du plan local d’urbanisme intercommunal (PLUI) obligatoire. Pour les élus communistes, républicains et du Front de gauche, le PLUI peut être un bon outil. Nous n’avons pas d’opposition de principe aux intercommunalités de projet, dès lors qu’elles sont concertées et volontaires. Du reste, une telle démarche est déjà possible, et donne dans certains cas de bons résultats, notamment lorsqu’elle est relayée de bonne façon sur le plan communal, en suscitant une réelle concertation et en actionnant une dynamique citoyenne.
En revanche, il n’est pas acceptable que ce PLUI soit rendu obligatoire, et que les communes soient dessaisies d’office de leurs compétences. Dans le droit fil de la réforme Sarkozy-Balladur de 2010, et du coup de force de l’été sur les métropoles, j’ai volontairement interpellé le Gouvernement sur le fait que ce texte organisait « l’intercommunalité avec un gourdin ! » L’urbanisme ne peut se concevoir sans la collaboration des élus et de la population, ni sans démocratie. Quel est le sens d’une décentralisation qui n’associe ni les maires ni les populations ? Quel est le sens d’une décentralisation qui réservera de fait l’urbanisme à des structures technocratiques ?
Le volet territorial du projet de loi ALUR est très négatif. Prenons, par exemple, l’article 61. Il retire le bénéfice de l’ingénierie juridique et technique des services déconcentrés de l’État à toutes les intercommunalités qui comptent de 10 000 à 20 000 habitants, lesquelles devront donc désormais financer sur leurs fonds propres les services d’application du droit des sols (ADS), en charge de l’instruction des permis de construire et autres actes d’urbanisme. Désengagement en bonne et due forme de l’Etat et nouveau transfert aux collectivités locales ?
Début 2013, j’avais d’ailleurs souligné les risques d’un désengagement de ce dispositif ADS mais aussi de l’assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire (ATESAT), aides techniques apportées gratuitement aux communes rurales, notamment pour les travaux de voirie communale. Les collectivités seront progressivement amenées à exercer pleinement ces missions avec l’aide des intercommunalités. En fait, la volonté politique du Gouvernement est d’arrêter l’instruction de l’ADS à titre gracieux et de ne plus conclure de conventions ATESAT avec les collectivités. Les suppressions d’effectifs dans ces deux domaines sont programmées, et s’accélèrent même en 2013, dans la continuité des années précédentes. Après la mise en concurrence de l’ingénierie publique, contre laquelle toute la gauche s’est élevée, le Gouvernement décide donc de continuer la destruction de services qui assurent des tâches d’intérêt général au plus près des collectivités et des citoyens. Des choix toujours plus inquiétants pour l’avenir des communes.
Chronique publiée dans le journal La Terre.