La bataille n’est pas grecque, mais européenne
Si la croissance est à ce point atone en Europe, c’est d’abord parce que les politiques d’austérité appliquées aux Etats, et la politique monétaire de la Banque centrale européenne, sont en totale décalage avec les besoins nécessaires à une relance de l’économie, de la consommation et à une expansion des services publics, si nécessaires pour répondre aux besoins du quotidien. Mais, depuis la victoire de Syriza en Grèce, la réorientation de la politique monétaire et du rôle de l’euro se pose de façon tout à fait nouvelle. Il ne s’agit plus d’un débat abstrait, trop souvent superficiel. Il y a maintenant dans un pays de la zone euro, la Grèce, un gouvernement, décidé à combattre l’austérité imposée par la « troïka » (Commission européenne – Fonds Monétaire International – Banque Centrale Européenne). Sa réussite est donc un enjeu concret pour toutes les forces de progrès en Europe. Elle exige la mobilisation des peuples et de toutes les forces progressistes.
Rappelons-le avec constance : la ferme volonté du nouveau gouvernement grec de renégocier sa dette ne porte pas seulement l’intérêt du peuple grec. Il s’agit d’instituer un rapport de force nouveau pour revoir le rôle de la BCE et la politique économique européenne dans son ensemble. Syriza lance bien un défi aux marchés financiers, et ils feront tout pour briser une politique qui touche au cœur de leur domination. Il est donc crucial de mener ce combat aux côtés des grecs, pour que le pouvoir de création monétaire de la BCE serve, non plus à alimenter les marchés financiers, mais au contraire à s’en libérer en réorientant radicalement l’utilisation de l’argent en faveur de l’emploi et des services publics.
Comme nous le voyons en Espagne avec le mouvement Podemos, qui vient de rassembler des centaines de milliers de personnes ce week-end, la mobilisation populaire et citoyenne, dans toute l’Europe, peut être plus forte que les attaques de la finance. Les forces sociales qui se sont levées en Grèce, qui se lèvent en Espagne, doivent pouvoir compter sur notre appui qui leur permet de dire : « il faut négocier car les peuples européens sont derrière nous ».
La priorité des priorités consiste ainsi à utiliser de façon rapide et massive les leviers de soutien à la croissance européenne, tout particulièrement pour les pays du Sud de l’Europe et les plus endettés. Aujourd’hui, les crédits vont en priorité aux entreprises qui placent leur argent sur les marchés financiers et aux Etats qui mènent des politiques d’austérité. Ce sont ces choix inefficaces qu’il faut renverser. Dès à présent, les traités actuels autorisent la BCE à mener une politique monétaire sélective. Alors qu’elle entend injecter 1140 milliards d’euros dans l’économie en quinze mois, qu’elle annonce deux choses : un rachat massif des dettes publiques, surtout si ces dettes servent à développer le potentiel de croissance efficace socialement et écologiquement et les services publics ; qu’elle agisse surtout sur les banques en mettant leur refinancement sous condition de création de valeur ajoutée dans les territoires et de développement de l’emploi.