Ne pas bouder son plaisir

Publié le par André Chassaigne

 Faire voter un texte à l’unanimité des différents groupes de l’Assemblée nationale est suffisamment rare pour que je ne boude pas mon plaisir. C’est ce que nous venons de vivre jeudi 7 mai avec un des trois textes de la « niche » annuelle du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, que portaient les députés du Front de gauche.

 Certes, les deux premiers textes ont été rejetés, sans beaucoup de surprise compte tenu des enjeux politiques forts qu’ils portaient. Leur examen en commission avait pourtant pu ouvrir quelques perspectives. L’un portait sur l’exigence d’analyser et expliquer la dette souveraine des Etats de l’Union Européenne. L’autre sur l’établissement d’un droit de préemption des salariés, en cas de cession de leur entreprise, pour une reprise sous forme de coopérative. Ces deux textes posaient des questions politiques d’importance sur la domination de la finance et la nécessité de développer la socialisation de notre économie par la maîtrise de l’outil de travail.

 Quant au texte que nous avons fait voter sur l’entretien et le renouvellement du réseau des lignes téléphoniques, il n’est pas à dévaloriser. Certes, j’ai eu quelques difficultés pour en faire comprendre l’intérêt par la rédaction de notre journal l’Humanité, dont les choix éditoriaux sont parfois éloignés des réalités de nos territoires ruraux. Une raison de plus pour regretter la disparition brutale et silencieuse, fin février 2015, de l’hebdomadaire porteur des questions de la ruralité qu’était La Terre.

 Notre proposition de loi répond en effet à un problème important touchant au quotidien des populations rurales : celui de l’accès au téléphone fixe. Cela peut surprendre à l’heure de la fibre optique et du haut débit, mais ce service universel « de base » souffre en effet de ruptures nombreuses, parfois longues, dues à une insuffisance d’entretien de son réseau cuivre par l’entreprise Orange, héritière de l’opérateur historique France-Télécom. Une évolution législative s’imposait pour remédier à une situation plus grave que cela peut apparaître au premier abord : sécurité sanitaire des personnes isolées, notamment âgées, équilibre économique d’entreprises dont l’activité implique en particulier l’accès à internet par l’ADSL, accessible par le téléphone fixe (hôtellerie-restauration, artisans, voire agriculteurs pour maintes déclarations administratives, etc…).

 Le texte apporte les réponses législatives et réglementaires qui s’imposaient (je vous invite à lire mon rapport sur cette proposition de loi et mon intervention en séance publique en allant sur mon site de député ou celui de l’Assemblée nationale). Il a aussi un coût pour Orange et les opérateurs : 30 à 40 M€ par an (pour 1,6 Milliards d’€ de dividendes versées aux actionnaires par le seul opérateur Orange en 2014).

 Mais l’intérêt de l’adoption de ce texte est aussi autre. Il est le fruit d’une démarche participative inédite, avec une élaboration collective dans la continuité d’une pétition citoyenne. Son écriture a en effet associé plus d’une centaine d’usagers et élus locaux. Cette pratique politique est la traduction d’une exigence démocratique qui reste souvent un simple slogan. L’approche théorique pour « rallumer les étoiles » et les appels enflammés à la tenue d’ateliers législatifs séduisent semble-t-il davantage qu’une mise œuvre concrète.

 J’ai souhaité écrire ces quelques mots avant mon envol pour un séjour de 48 h à Cuba : privilège agréable pour le président de groupe d’amitié France-Cuba de l’Assemblée nationale, que je suis, alors que le Président de la République effectue un déplacement sur les terres de la révolution cubaine. Sur ce point, chacun comprendra que, là-aussi, je ne souhaite pas bouder mon plaisir ! Au-delà du plaisir, ce sera l’objet de ma prochaine chronique au retour des Caraïbes.  

 

Ne pas bouder son plaisir
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M
Les commentaires demontrent combien l'amenagement de la métroploe est inégalitaire.<br /> Il ne faut pas se plaindre de l'exode rural alors que depuis trop longtemps, les politiques conduites ont délaissé les campagnes françaises.<br /> L'inégalité d'accès au téléphone en est un exemple.<br /> On pourrait dire de même pour le réseau ferré. Sous Napoléon III des lignes de chemin de fer ont recouvert et traverséenos départements.<br /> J'ai un ancêtre qui a contribué à percer le tunnel du Lioran, non sans dommage.<br /> Aujourd'hui, ces lignes faute d'entretien ont été fermées, abandonnées ou ne répondent plus au besoin parce que la vitesse des trains y est trop ralentie.<br /> Les pires mences pèsent sur le "Cévenol" qui est un bijou touristique national.<br /> On a connu Clermon-Ferrand Marseille par train. <br /> J'ai pris Nimes- Clermont-Ferrand mais on raccourci encore la ligne.<br /> On a tout mis sur le TGV, le Paris- Lyon, le Paris- Bordeaux ... et les autres ???<br /> Plus possible de faire Clermont- Ferrand Bordeaux en train : la SNCF impose de passer par Paris !!<br /> Et d'aller en métro de la gare de Bercy à la gare Montparnasse.<br /> Depuis le 10 juillet 2015, à la gare routière de Clermont- Ferrand, il existe une ligne allant jusqu'a Bordeaux pour 9 euros par personne mais .... en car !<br /> C'est bien pratique mais cessons de délaisser nos campagnes, nos petites villes, nos villages qui font la beauté de nos paysages, la tradition, la qualité de vie, la préservation de nos traditions, de notre culture, qui attirent nos touristes et garantissent l'avenir, au moins culturel, de nos enfants.
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D
Merci de cette initiative, nous sommes actuellement dans une maison de famille dans ls Cévennes, 2 personnes âgées avec nous et pas de téléphone fixe (3ème panne en 15 jours), sommes à 3 km du village et les portables n'ont pas de réseau (pour aller signaler la panne à Orange depuis un portable il faut faire 2 km). Ce problème est récurrent, tous les habitants du village sont touchés tour à tour, Orange se fout de ses abonnés...
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L
Le manque de réseau ADSL haut débit n'est pas l'apanage des secteurs ruraux en effet mon quartier la Planète à Tarbes ville de plus de 40 000 Abt est desservi par un réseau avec 2 MB maxi, donc pas e télé avec internet et cela rame pas mal pour voir les vidéos;<br /> La réponse d'un commercial d'un opérateur c'est de la responsabilité de la commune.<br /> Ou passe l'argent des abonnés, en dividendes peut être?
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M
Le problème soulevé correspond bien à une réalité.<br /> J'habite à Chavaroux, circonscription du député, petit village de plus de 400 habitants dans la plaine de la Limagne, à 17 km de Clermont- Ferrand.<br /> Le portable n'a pas de réseau : SFR ne couvre pas, Orange trés, trés mal et Bouygues trés trés peu.<br /> Pour communiquer, mon voisin comme moi, allons dans la rue, sur la place de l'église, essayons d'avoir "une ou deux barrettes" pour capter l'interlocuteur.<br /> Lors des dernières élections départementales, en réunion publique, j'ai questionné le conseiller général a ce sujet. Après une réponse amusante : sortir c'est bien et aller sur la place peut être agréable, (surtout en hiver et quand il pleut !) il a reconnu son incapacité a faire changer cet état de fait.<br /> Les autres habitants pensaient que l'antenne sur le château d'eau ( qui se voit de loin et depuis l'autoroute) était une antenne-relais du téléphone : pas du tout ! <br /> Nous avons tous appris qu'il s'agissait d'une antenne de la Défense nationale, servant ä la couverture radar du territoire.<br /> En attendant, alors que l'on parle de la 4 G et autres modernités, nous continuons de nous contortionnner sur la place du village pour tenter de capter un appel téléphonique !!
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L
Tout ceci est exact,le réseau téléphonique en province est délabré.J'ai une maison dans le sud un village du Languedoc. les lignes téléphones sont saturées et souvent défaillantes.On m'a confisqué ma ligne pour la céder à un autre client ! Du jamais vu.Nous sommes dans la situation des soixante que j'ai connues ! C'est le fameux 22 a Asnières !
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