Les cheminots ne font pas grève par plaisir !

Publié le par André Chassaigne

 On ne fait jamais une grève par plaisir, ni sans raisons. Le scandaleux lynchage médiatique dont ont été victimes les cheminots en grève, alors qu’ils défendaient l’intérêt général, l’avenir des usagers et du système ferroviaire public, semble pourtant s’être constamment appuyé sur un déni de ce principe. La diabolisation médiatique, voire politique, de ce conflit social a ainsi permis d’ériger un véritable écran de fumée quotidien devant leurs revendications et le fond du débat sur le texte proposé par le Gouvernement.

 Comme parlementaires, les députés communistes et du Front de gauche ont cherché à relayer les propositions les plus essentielles des cheminots. A chaque fois, nous avons suscité la prise de conscience du plus grand nombre sur les sujets fondamentaux pour les usagers d’une réforme ferroviaire qui réponde réellement aux besoins et au défi de la transition écologique pour notre pays. Notre vote final négatif sur ce projet de loi de réforme ferroviaire ne découle ni de postures prédéterminées, ni d’un repli sur soi qui n’aurait servi qu’à scléroser encore plus le champ du débat démocratique. Comme chacun de nos votes, il essaie de s’appuyer sur une analyse objective du contenu final au regard des enjeux posés.

 Notre implication dans le débat parlementaire aura permis d’enregistrer quelques avancées, notamment pour garantir une plus grande unicité économique, sociale et technique du nouveau groupe ferroviaire public. Mais force est de constater que le résultat final est très éloigné d’une réforme répondant aux menaces qui planent sur l’avenir du fer, en France comme en Europe. Car nous sommes engagés depuis plus de vingt ans, dans un processus continu de libéralisation des services publics des transports. Depuis la première directive européenne de libéralisation du secteur des transports, en 1991, la Commission poursuit le dogme de l’efficience du marché en s’appuyant sur le principe de la « concurrence libre et non faussée » inscrit dans les traités européens.

 Le projet de réforme adopté la semaine dernière s’intègre à ce vaste programme de libéralisation et ne porte pas de réelle volonté d’améliorer la qualité du transport due aux populations dans le cadre d’un service public. Il ne porte pas d’ambition de report modal, qui est pourtant un élément clef de la transition écologique. Il n’est pas non plus à même de contrecarrer la volonté de la Commission de disloquer les entreprises publiques historiques, pour offrir aux entreprises privées le libre accès au réseau ferroviaire, sur fond de dumping social. Certes, il met fin à la séparation stricte des activités entre RFF et SNCF intervenue en 1997, mais pas à l’émiettement en activités de plus en plus autonomes, à la multiplication des filiales, à la généralisation de la sous-traitance, à l’abandon du fret.

 Surtout cette réforme n’ouvre aucune perspective nouvelle sur le financement de la rénovation et du développement du réseau, à l’origine de la majorité des désagréments quotidiens des usagers, et reconnu comme un besoin prioritaire pour les territoires. Sans moyens de financement renouvelés, il ne sera pas possible de rebâtir le grand service public ferroviaire que nous appelons tous de nos vœux, un service public qui réponde aux attentes des usagers et relève le défi de la transition écologique. C’est cette aspiration à rebâtir un grand service public ferroviaire qui était au cœur des revendications des cheminots comme de notre action parlementaire.

 

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