Pour une construction collective du travail parlementaire
Depuis quelques jours, un emballement s’est emparé du Front de Gauche, à la suite d’une « annonce solitaire » que j’aurais faite concernant le projet de loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école. Je me dois tout naturellement de lever les incompréhensions sur ce point.
- Préciser d’abord que je n’ai fait ni « déclaration », ni « communiqué ». J’ai tout simplement répondu à la question d’un journaliste à l’occasion du point presse hebdomadaire que je tiens, chaque mardi, à l’issue de la réunion du groupe de la Gauche Démocrate et Républicaine. Comme je le fais chaque fois que je suis interrogé sur un texte inscrit à l’ordre du jour, je me suis limité à donner la position des députés Front de gauche. Cette position est décidée collectivement, après un exposé du député chargé du suivi du projet de loi, à la suite de consultations et auditions conduites en amont, et en prenant en compte les orientations politiques du Front de gauche.
- Il est rare que nous annoncions d’emblée ce que sera notre vote final. Nous sommes en effet attachés à faire évoluer les textes qui nous sont soumis. Je considère qu’il est de notre responsabilité de parlementaires, de ne pas nous limiter à une simple fonction tribunitienne. Cependant, quand le texte porte sur des enjeux politiques forts, et marque des abandons gouvernementaux, le groupe n’hésite pas à exprimer d’emblée son opposition ferme, même s’il compte mener une bataille d’amendements durant les débats. Cela a été notamment le cas dès qu’a été signé l’accord scandaleux sur la sécurisation professionnelle : notre opposition a été immédiate, nette, et définitive, contre cette dérive sociale-libérale aux conséquences graves sur la vie et les droits des salariés. D’emblée, nous avons fait connaître notre forte mobilisation contre cet accord et le texte de loi le retranscrivant.
- Sur la loi d’orientation scolaire, je me suis limité à constater le caractère « déclaratif » du projet de loi, soulignant qu’il apparaissait « volontariste » sur certains points (scolarisation des moins de 3 ans, formation des enseignants) mais qu’il était extrêmement inquiétant concernant une territorialisation de notre système éducatif, avec une remise en cause de son pilotage national, en particulier avec la régionalisation de l’orientation et de la formation professionnelle et l’ambigüité entre mission scolaire et péri-scolaire.
J’ai précisé que notre vote serait « fonction des débats, des amendements, des avancées qu’on pourra avoir sur ce texte » et qu’une décision de vote contre, prise a priori, n’avait pas été retenue.
Le débat ne débutant que le 11 mars, et le travail en commission n’ayant pas alors commencé, je n’ai pas jugé pertinent d’approfondir notre analyse. Ce sera bien sûr l’objet des interventions que feront en séance nos porte-parole, Marie-George Buffet et Gaby Charroux. A cette occasion, ils pourront promouvoir l’excellent travail réalisé par le Front de gauche de l’éducation en déclinant les propositions de notre projet pour l’école. Bien évidemment, les députés du Front de gauche sont aussi disponibles pour déposer une proposition de loi alternative issue de l’approche collective de toutes les forces mobilisées sur cette question : militants du Front de gauche, syndicalistes, parents d’élèves, chercheurs…
- Cette démarche collective, souhaitée par les parlementaires du Front de gauche, vient de se concrétiser avec la rédaction d’une nouvelle proposition de loi, commune à nos groupes du Sénat et de l’Assemblée nationale, à laquelle a été étroitement associé le Front des luttes. « Visant à interdire les licenciements boursiers et les suppressions d’emplois abusives », cette proposition de loi, qui me paraît prioritaire, vient d’être finalisée et sera présentée prochainement par les parlementaires et le Front des luttes. Elle alimentera nos interventions et amendements sur le projet de loi concernant l’Accord National Interprofessionnel.
Soyons donc attentifs à ne pas opposer l’engagement des uns et des autres. Il faut prendre en compte que la tâche des dix députés du Front de gauche est colossale. De plus, elle est complexe, puisqu’il s’agit de travailler avec des moyens limités, sur des textes proposés dans des temps courts, tout en ayant le souci permanent de faire évoluer les textes soumis au débat et de développer les propositions alternatives de notre programme « L’humain d’abord ».
Sans aucun doute, la meilleure réponse est bien celle de la construction collective de tous ceux qui considèrent, comme moi, que le Front de gauche, ses propositions et ses luttes sont une chance pour le peuple de France.