Faire front commun contre l’austérité

Publié le par André Chassaigne

Interview publiée dans le journal Communistes, supplément au journal l'Humanité du 12 septembre 2012.


A l’heure de la rentrée parlementaire, entretien avec André Chassaigne, président du groupe des députés communistes et du Front de gauche à l’Assemblée nationale.

Communistes : Comment apprécier la situation du pays ?

André Chassaigne : Je crois d’abord qu’il faut bien mesurer l’ampleur des effets de la cure d’austérité appliquée à toute l’Europe, malgré le cataclysme grec. Toutes les économies de la zone euro sont entrées en récession, avec une explosion du nombre de chômeurs et de la précarité. Le constat est accablant pour les pompiers-pyromanes de la crise. Face à cette situation, plus que jamais la gauche est placée devant ses nouvelles responsabilités. Elle doit relever la tête pour engager le redressement du pays, en rompant avec la ligne de « l’austérité-autoritaire ».

Communistes : Sur quelles bases ?

AC : Je vois pour ma part trois enjeux politiques déterminants qui se dessinent pour le pays, et qui nécessitent de mettre toutes les forces progressistes, et celles du Front de Gauche, au service d’un vrai changement.

Le premier, c’est celui du traité européen et de sa règle d’or. Ce « coup d’Etat à froid », décrypté par Patrick Le Hyaric dans son dernier ouvrage « L’Europe des peuples nous appelle », est le véritable cheval de Troie de l’austérité généralisée. Il nous faut mobiliser sur le contenu de ce texte, sur ses implications dramatiques pour la vie future des Européens. Nous avons besoin d’expliquer le plus clairement possible la contradiction totale entre ce qui figure dans ce texte, c’est-à-dire le corset budgétaire à durée indéterminée imposé par la Commission européenne aux Etats, et la volonté affichée par les différents gouvernements européens de relancer la croissance et l’emploi. De la rue jusqu’au Parlement, cherchons avec le Front de Gauche le rassemblement le plus large des citoyens, avec comme première exigence, la tenue d’un référendum.

Le deuxième, c’est celui de l’emploi, avec le besoin de réponses urgentes face au chantage des responsables des grands groupes, de leurs actionnaires et des marchés financiers. Poussons très loin l’exigence de mesures législatives sur l’interdiction des licenciements boursiers, en faveur de nouveaux droits pour les salariés, et de nouveaux outils financiers de développement. Nos députés et sénateurs du Front de Gauche ont déjà travaillé sur plusieurs textes avec des mesures immédiatement applicables. Cherchons des majorités populaires et politiques pour avancer dans ce sens dans les semaines et mois à venir.

Le troisième, c’est celui de la relance budgétaire et de la refonte fiscale, avec le débat à venir sur le projet de loi de finances pour 2013, en cherchant à aller beaucoup plus loin que les premières intentions du Président de la République.

Communistes : Mais sur ces trois enjeux, on voit bien que la majorité au pouvoir se résigne ?

AC : Je crois que les millions de voix du Front de Gauche aux présidentielle et aux législatives, que les Françaises et les Français qui souhaitent le changement, n’attendent pas de nous d’être des spectateurs impuissants, voire des tireurs isolés, face à la ligne social-libérale qu’adopterait un Gouvernement de gauche. Nous n’avons aucune raison valable de renoncer à porter nos exigences dans le débat public, dans le mouvement social, comme dans les institutions. Au contraire, je crois que la situation nous impose un double effort politique : poursuivre et amplifier, avec les citoyens, avec le mouvement social, la dynamique d’appropriation de nos propositions face à l’austérité généralisée ; et user dans le même temps de tous les moyens pour être utile, pour faire avancer des mesures concrètes pour changer la vie dès maintenant.

Communistes : N’est-ce pas un combat perdu d’avance ?

AC : Quand le MEDEF et les privilégiés de la fortune mènent un lobbying intense pour affaiblir toute dynamique de progrès social, je suis convaincu que notre travail de fond devient une condition essentielle pour modifier les rapports de force. Je l’ai déjà dit lors de mes dernières interventions, ne nous en tenons pas à commenter « la chronique d’un échec annoncé », qui ne servirait d’ailleurs qu’à dédouaner un Gouvernement qui ne rêve que d’être totalement libre de ses mouvements. C’est un front politique durable qu’il nous faut édifier pour redresser le pays, en imposant par notre action collective « la chronique d’un échec refusé ».

 



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