Les langues régionales : bien commun à promouvoir
Le plurilinguisme est une expression de la richesse de la société française. La France doit accepter sa diversité linguistique et, plus encore, en faire un atout. Cette exigence, les parlementaires communistes la portent majoritairement depuis longtemps : deux propositions de loi allant dans ce sens avaient été déposées dès les années quatre-vingt. Assurer la protection des langues régionales ou minoritaires historiques de l’Europe et favoriser le droit de pratiquer une langue régionale ou minoritaire dans la vie privée et publique sont deux objectifs nécessaires à la défense de notre patrimoine national. En outre, comment revendiquer la diversité culturelle et linguistique dans le monde face à l’hégémonie de l’anglo-américain et, dans le même temps, la refuser à l’intérieur de notre pays ?
La valorisation de la richesse linguistique en France et dans le monde participe à la défense de la langue française, langue de la République. Aussi, c’est en toute logique que nous avons soutenu le processus législatif en vue de la ratification par la France de la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, même si nous considérons que celle-ci est incomplète, en particulier en ce qui concerne les langues issues des immigrations, parlées par nombre de nos concitoyens. En effet, la charte comporte, à l’article 1er, une définition restrictive de l’expression « langues régionales ou minoritaires » qui exclut de son champ d’application les dialectes de la langue officielle et les langues des migrants. Il faut ainsi réaffirmer la nécessité et l’urgence d’accentuer un apprentissage des langues de l’immigration au sein du système éducatif, en particulier de l’arabe, au même titre que les autres langues vivantes.
De même, j’ai alerté sur le risque d’un nivellement linguistique par l’utilisation d’expressions unitaires courantes comme « l’occitan », qui peuvent mener à une élimination de toutes les variantes de la langue d’oc, laquelle est pourtant marquée par des formes particulières. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité que la liste des langues régionales auxquelles s’appliqueront les engagements pris par la France soit exhaustive, de façon à assurer la promotion de toute la diversité linguistique de nos régions. Patrimoine immatériel vivant, une langue ne se décrète pas, elle se vit et se transmet par ses locuteurs.
Au-delà de ces remarques, je comprends les inquiétudes qui se font jour, y compris au sein de notre groupe. Je considère cependant que le texte y répond avec la réaffirmation expresse du principe d’égalité de tous les citoyens sans distinction d’origine et du principe selon lequel la langue de la République est le français. Ce dispositif juridique permettrait de garantir que nos principes constitutionnels prévaudraient sur des interprétations abusives de la charte.
La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale constitue ainsi un bon compromis. Nous espérons que cela conduira la France à mettre en œuvre une véritable politique nationale de promotion et d’encouragement des langues régionales, qui devrait être étendue à toutes les langues de France, en respectant la diversité de leur usage local. Elles sont notre bien commun ; elles concourent à la créativité de notre pays et à son rayonnement culturel.
Chronique publiée dans le journal La Terre.