Une semaine mouvementée
Je peux ce samedi faire un retour sur la semaine écoulée : je le consacre en effet au travail personnel dans mon petit bureau de la permanence parlementaire, à l’entrée de la mairie de St-Amant-Roche-Savine. J’ai en effet maintenu la location après ma démission de maire, fin mars dernier, mandat que je m’étais engagé à abandonner à la suite de mon élection comme conseiller régional… et après 27 ans de mandat.
La fenêtre donne sur une petite place au cœur du bourg. Je me sens bien dans ce petit espace : c’est au milieu de mes dossiers que mon esprit se libère le mieux. Je reçois les habitants de l’arrondissement, je lis, annote, réparti dans plusieurs sacs le travail de mes collaborateurs, travaille mes interventions, dicte un courrier à mon assistante Corinne. Nous préparons aussi le planning des semaines à venir : lourde tâche !
Ainsi, vendredi matin, nous avons pu avancer sur l’agenda des déplacements hors département : Unieux, dans la Loire, le 24 septembre ; le forum de Libération à Lyon le 25 septembre ; les Pyrénées-Atlantiques les 29 et 30 septembre ; Marseille le 6 octobre ; Orléans le 7 ; la région PACA le 14… En novembre, sont déjà prévus Brive, Toulouse, Montauban, Lorient.
Parallèlement, nous avons calé plusieurs séances de dédicaces de mon ouvrage « Pour une Terre commune », qui arrive cette semaine en librairie. Je mesure l’ampleur de la tâche après la sortie de ce livre et l’annonce de mon offre de candidature au Front de gauche pour les élections présidentielles. Le week-end dernier, la reprise par les médias nationaux de cette candidature a fait événement à la Fête de l’Huma. Rien de nouveau pourtant : j’avais tenu les même propos dès le 20 juin dernier dans une intervention au Congrès du Parti Communiste. J’avais alors dit ma volonté d’être un candidat possible pour porter dans l’unité le projet du Front de gauche, précisant mon engagement total pour une candidature de rassemblement, quel(le) que soit celle ou celui qui sera au final choisi(e) par ce formidable rassemblement qui s’est constitué à l’initiative du Parti Communiste Français. C’est toujours ma volonté. Je ne souhaite en aucun cas être l’artisan d’un retour en arrière après le formidable espoir ouvert par le Front de gauche.
Je reviens donc sur la semaine écoulée par quelques éclairages sur les événements marquants.
D’abord, en ce qui me concerne, l’entourloupe d’un journaliste qui tire d’un échange téléphonique informel une « interview » qui déforme mes propos et me place en rival discourtois d’un autre candidat possible du Front de gauche : Jean-Luc Mélenchon. Je découvre dans le texte des expressions choquantes, des mots que je n’utilise jamais. Je ne me retrouve pas dans ce texte qui confond confrontation démocratique et guerre intestine. Cet incident a au moins un mérite : me vacciner contre les chercheurs de sensationnel et me faire prendre conscience de l’exigence d’une communication mesurée.
Mardi 14 septembre a été la grosse journée de la discussion de la loi sur les retraites. Je dois pour ma part intervenir durant la nuit sur les dispositions applicables au régime des exploitants agricoles : le sujet des retraites agricoles est en effet au cœur de mon activité parlementaire depuis mon élection en 2002. Je compte aussi parler de la pénibilité du travail des salariés agricoles à laquelle j’ai été particulièrement sensibilisé lors d’un colloque de la FNAF-CGT, que j’avais présidé à l’Assemblée nationale le 17 juin dernier, et durant l’Université du MNLE (Mouvement National de Lutte pour l’Environnement) fin août à St-Amant-Roche-Savine. Je prends la parole vers 2 heures 30 du matin, portant le témoignage terrible d’un salarié de l’agro-alimentaire brisé par des années de travail dans un abattoir de porcs. J’ai dans ma musette plusieurs autres témoignages édifiants recueillis auprès de travailleurs soumis à des conditions de travail particulièrement pénibles : je veux démontrer avec ces cas concrets que la retraite à 60 ans n’est pas une simple coquetterie de salariés en pleine forme. Je suis interrompu dès ma seconde intervention : le groupe GDR a épuisé son temps de parole ! Je me trouve ainsi sous le couperet du scandaleux « temps législatif programmé », issu de la réforme du règlement de l’Assemblée nationale, mise en œuvre par l’UMP. Je suis bâillonné ! Je ne pourrai pas porter les pages de vie qui devaient constituer mes prises de parole. J’en tire une colère mêlée de frustration. Je trouve ce déni de démocratie insupportable. Au petit matin, ce sera le tour du groupe socialiste. Il reste alors 5 minute d’explication de vote pour chaque député. J’ai préparé la mienne, pesant chaque mot pour rester dans le temps imparti. Inutilement. Les explications de vote seront censurées par le Président Accoyer mettant brutalement fin au débat à la demande de l’Elysée.
La journée du mercredi 15 septembre 2010 restera ainsi dans l’histoire parlementaire comme une atteinte rare au droit de parole de la représentation nationale, fortement symbolique d’un pouvoir aux abois.
Mais le grand moment de la semaine écoulée a été pour moi, en début de ce mercredi après-midi, la traversée du pont de la Concorde quand nous avons, parlementaires communistes et du Front de gauche, ceints de nos écharpes tricolores, rejoint les milliers de syndicalistes manifestant pour appeler les députés à ne pas voter le texte de loi. Un immense calicot s’adresse à nous : « Messieurs et Mesdames les députés, ne votez pas. Cette réforme est injuste ». L’émotion est intense, avec la confirmation de l’immense force du mouvement populaire.
Tout est encore possible : les sénateurs vont prendre le relais, les manifestations du 23 septembre peuvent encore tout bousculer. Je reviens en séance, persuadé que rien n’est perdu malgré le vote attendu d’une majorité parlementaire aux ordres.
Le même soir arrive le débat sur la réforme territoriale. Retenu en fin d’après-midi par la présentation de mon livre au salon des Comité d’Entreprise, je laisse le soin à mon ami Jean-Paul Lecoq de prononcer la motion de procédure qui m’était dévolue. Je reprends du service pour la séance de nuit, seul à gauche avec le Vert François de Rugy… avant d’être l’unique représentant de l’opposition le jeudi matin ! Les socialistes ont en effet décidé de boycotter l’hémicycle à la suite du putsch sur les retraites. Mes nombreuses interventions me permettent de relayer les inquiétudes des élus locaux et de demander le rejet d’un texte qui bouleverse totalement nos institutions et porte en coup terrible à la démocratie locale. Je m’efforce de montrer ce que seront les conseillers territoriaux et à quel point ce texte prépare la disparition de l’échelon communal et la privatisation des services publics locaux. Jeudi matin, j’ai en face de moi 3 ministres (Mercier, Marleix, de Raincourt) et une vingtaine de députés de la majorité. Je peux débattre sans être limité et en profite pour faire passer quelques messages forts… mais je me sens bien seul !
Le retour en circonscription me ramène sur le terrain. Après une réunion de travail en Mairie d’Ambert, une inauguration passionnante d’une usine de fabrication de granulés bois à Arlanc me permet d’évoquer des problèmes locaux avec le Préfet de région, d’échanger avec de nombreux chefs d’entreprises (en particulier des scieurs) et les élus locaux en nombre. L’écologie est au cœur de nos propos… et je nourris mon intervention de quelques idées tirées de mon livre.
Il me faut ensuite une heure de route, par les monts du Livradois, pour rejoindre Sermentizon où la population du village et les élus locaux sont réunis pour une remise de médailles à deux de mes amis : l’ancien maire Elie Fayette, qui a présidé le Parc Naturel Régional Livradois-Forez, et Gilles Bournilhat, un camarade, ancien conseiller municipal, éleveur en race à viande bio. Après la cérémonie, je traîne, trinque et discute. J’explique et m’explique. Un moment de partage et de bonheur. Comme chaque fin de semaine, je me ressource !